Hommage aux docteurs Florence Nightingale et Anna Hamilton (Lettre 66)

par Christiane Guttinger

 En mai 1820, il y 200 ans, naissait Florence Nightingale (Florence 1820-Londres 1910), de parents anglais aisés et cultivés, qui lui donnent eux-mêmes une éducation humaniste qu’elle demande à compléter par des mathématiques. Les Nightingale sont protestants unitariens, attentifs aux autres et aux préoccupations sociales.

Lors d’une épidémie de grippe, Florence qui a alors 17 ans, assure le rôle d’« infirmière, gouvernante, soutien moral et médecin » auprès des malades de son entourage, et écrit dans son journal : « Dieu m’a parlé et m’a appelée à son service».

Lors de voyages en Italie, Grèce et Egypte, elle fait le tour des hôpitaux, et un stage en Allemagne, à l’institut de Kaiserwerth, géré par des diaconesses qui soignent, pansent, préparent les médicaments et assistent les médecins lors d’opérations.

Elle refuse une vie mondaine et conformiste[1], veut devenir infirmière, et se heurte au manque de formation et aux principes de la bonne société qui soigne ses malades à la maison ; et destine les hôpitaux aux pauvres.

En 1853, elle devient surintendante d’une petite institution[2] londonienne qui accueille des dames de bonne famille[3], dont les revenus sont insuffisants pour couvrir des soins privés. Elle fonde son école d’infirmières et de sages-femmes, et en publie le programme en 1860, Notes on Nursing, un petit livre de 136 pages insistant sur l’hygiénisme.

A la lecture de ce livre, Anna Hamilton (1864-1935) fille de la sœur du pasteur Léon Pilatte et d’un aristocrate anglais, trouve sa vocation. 1ère femme étudiante en médecine à Marseille en 1890, elle soutient à Montpellier, en 1900, sa thèse intitulée « Considérations sur les infirmières des hôpitaux ».

En 1901, elle prend la direction de la Maison de santé protestante de Bordeaux, fondée en 1863, et y fait complètement évoluer le métier d’infirmière. Elle modernise les locaux, clairs et aérés, adaptés aux normes de l’hygiène pasteurienne avec la stérilisation, des équipements sanitaires, et rationalise la gestion. Parallèlement, elle élève le niveau des soins en recrutant ses élèves dans un milieu bourgeois cultivé, et introduit les plus récentes spécialités médicales.

Bénéficiant du mouvement de laïcisation, les infirmières de Bordeaux essaimeront et réorganiseront les hôpitaux français en remplaçant les sœurs congréganistes avec beaucoup plus de professionnalisme. N’étant plus seulement exécutrices du médecin mais des auxiliaires, elles s’imposent par leur sens des responsabilités et leur savoir-faire.

Pendant la guerre de 14, la Maison de santé de Bordeaux devient hôpital auxiliaire. En 1918, l’école de garde-malades prend le nom d’école Florence Nightingale avec l’aval de la famille. Anna Hamilton, soutenue par des infirmières de la Croix rouge américaine qui l’on vue à l’œuvre, se rend aux États-Unis, et le révérend Charles Mac Farland, président du Comité de secours pour les protestants en France et en Belgique (Committee for Christian relief in France and Belgium), l’aide, grâce à des fonds internationaux et américains, à construire l’internat-école de Bagatelle (dit aussi American nurse memorial à Talence) dont elle a conçu les plans.

 

En cette période de pandémie, nous rendons hommage au personnel soignant en évoquant les personnalités de Florence Nightingale et Anna Hamilton qui ont tant contribué à l’amélioration des soins par la promotion de l’image de l’infirmière moderne, compétente et responsable.

 

(Culture protestante, chronique mensuelle des Amitiés huguenotes internationales, diffusée sur France Culture, à 8 h 55, le 2 aout 2020).

Photo d'un billet de 10 Livres montrant F. Nightingale

Florence Nightingale, surnommée la Dame à la lampe, acquit une grande renommée en soignant les soldats pendant la guerre de Crimée (1858) ; elle figure au revers d’un billet de 10 £ à l’effigie de la reine Elisabeth II, édité vers 1960.

 

Sources et pour aller plus loin :

Wikipedia

Simone CRAPUCHET, Protestantisme et écoles de soins infirmiers de la IIIe à la Ve République, Presses du Languedoc, 1996.

Evelyne Diebolt, Anna Hamilton (1864-1935), L’excellence des soins infirmiers, dans Recherche en soins infirmiers 2017/4 (N° 131), pages 85 à 100 (en ligne)

Journal de la jeune Fille, publication des UCJF dans lequel Anna Hamilton écrivit des articles sur l’hygiène, la maison de santé de Bordeaux, Florence Nightingale, prospectant peut-être parmi les Unions de jeunes filles le recrutement de son école.

Anna Hamilton se fit apprécier des infirmières américaines qu’elle côtoya pendant la guerre ; fit partie du CARD (Comité américain pour les régions dévastées) fondé par Anne Morgan mettant l’accent sur l’éducation à l’hygiène.

 

 

[1] Elle participe activement à la réforme des Poor Laws, et incite les jeunes infirmières à. œuvrer à la Liverpool Workhouse Infirmary)

[2] l’Institute for the Care of Sick Gentlewomen (Institut pour les soins aux dames malades), fondée en 1850

[3] Les patientes sont souvent des gouvernantes, une des rares professions féminines considérées comme respectables, ainsi que des épouses de pasteurs, de petits commerçants, d’officiers.

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