Le nom de Jean Huss est gravé au mur de la Réformation à Genève, aux côté de ceux de deux autres précurseurs de la Réforme, Pierre Valdo (son attitude évoque celle de Pierre Valdo et des « pauvres de Lyon », au XIIes. Des Vaudois avaient d’ailleurs émigré jusqu’en Bohème.) au XIIe siècle et John Wyclif au XIVe siècle.
Jean Huss tient son nom du village de Bohême, Husinec, au nord-est de Prague, où il nait vers 1371 dans une famille de paysans. Il fait ses études de théologie à l’Université de Prague, est ordonné prêtre en 1400 et nommé doyen de la Faculté de théologie l’année suivante.
À partir de 1402, il prêche en langue tchèque dans la chapelle de Bethléem à Prague, devant des assemblées atteignant jusqu’à trois mille personnes. Confesseur de la reine, il bénéficie d’abord de l’appui de l’archevêque et du roi Venceslas IV (1378-1419). Il s’exprime officiellement aux synodes annuels de Bohême.
On sait que ce sont des Suisses protestants qui ont lancé l’alpinisme à la suite d’Horace-Bénédict de Saussure qui le premier gravit le Mont-Blanc. On sait moins la place que les protestants ont tenue dans la découverte et l’étude des Pyrénées.
« Les Pyrénéistes protestants », voilà le thème de l’Exposition que leur a consacrée, ce printemps, le Musée Jeanne d’Albret à Orthez, avec comme sous-titre « Etudier, aimer, révéler ». Car ces hommes ne se sont pas contentés de gravir des sommets qui quelquefois d’ailleurs portent leur nom, ils se sont livrés à des études de géologie, hydrographie, glaciologie, ils ont cartographié, photographié et ils ont publié leurs résultats.
Cette approche scientifique de la haute montagne peut-elle s’expliquer par le protestantisme ? En un certain sens, oui, dans la mesure où les protestants ont très tôt contesté les croyances traditionnelles, et plus particulièrement celle de la création du monde – l’existence de fossiles marins dans les montagnes remettant en cause le récit de la Genèse. Bien sûr, les protestants ne sont pas seuls à se passionner pour les Pyrénées, mais leur proportion ici est beaucoup plus importante que dans l’ensemble de la population française. Et la toponymie de bien des sites pyrénéens en porte la trace.
Lors des Journées du Patrimoine et de Protestants en Fête, plusieurs temples ouvriront leurs portes pour des expositions, concerts et conférences. Pourquoi ne pas en profiter pour jeter un nouveau regard sur ces édifices ? Un livre abondamment illustré consacré aux Temples réformés et églises luthériennes de Paris est édité à l’occasion de la naissance de l’Eglise Protestante Unie de France. Trop rarement ouverts en dehors des cérémonies et des cultes, la plupart de ces 25 lieux de culte parisiens en activité, ainsi que quelques édifices désaffectés ou disparus, sont méconnus. Leur austérité légendaire révèle bien des surprises.
Réforme et Tolérance, tel était le thème du dernier colloque des musées protestants, qui s’est tenu il y a quelques semaines à Wittenberg, petite ville de Saxe-Anhalt, au bord de l’Elbe, à une centaine de kilomètres au sud de Berlin.
Wittenberg est surtout connue pour être la ville du Réformateur allemand, Martin Luther. C’est ce qui explique qu’aujourd’hui la ville ait pris le nom de Lutherstadt, et que, tout naturellement, elle mette en avant ses liens étroits avec la Réforme protestante.
Il est vrai que de nombreux bâtiments sont associés aux événements de ce temps.
Une partie du cloître augustin dans laquelle Luther a demeuré avec son épouse Katharina von Bora et leurs six enfants, est préservée, et a été transformée en un très important musée, contenant de nombreux témoignages de et sur Luther, spécialement les portraits peints par Lucas Cranach l’Ancien et Lucas Cranach le Jeune.
Les étapes des itinéraires huguenots internationaux reliant la Drôme à Bad Karlshafen se mettent en place. Ainsi, en Argau (Suisse), l’ouverture du tronçon Schafisheim-Stanberg-Lenzburg (6,7 km parcourus en 2 h 25) va de pair avec deux petites expositions présentées au château de Schafisheim et au musée Burghalde à Lenzburg.
Le village de Louisendorf (Hesse) a fêté ses 325 ans par différentes animations : marche sur le sentier huguenot de 8 km entre Frankenberg et Louisendorf, conférence, expositions et dimanche festif. Le comte Charles avait accueilli 118 réfugiés venant du Diois en 1688, repeuplant le village abandonné d’Hammonhausen, rebaptisé Louisendorf, du prénom de sa fille en 1700. ←L’église et l’école remontent à cette époque ; la pratique de la langue française s’est maintenue à l’école jusqu’en 1850, dans l’église jusqu’en 1870 et dans quelques familles jusqu’au début du 21e siècle ! Un jumelage scellé en 1991 entre Die et Frankenau/Louisendorf avait déjà rapproché les deux communes.
Un nouveau musée du protestantisme vient de voir le jour à Dunkerque, dans le temple, 16bis quai aux Bois. Dunkerque, port de Flandre, situé au plus étroit de la mer du Nord, était un point de passage obligé pour les navires anglais ou hollandais. Il a été fréquenté par les « gueux de mer », acquis à la Réforme et pourchassés, qui aidèrent les anglais et Guillaume Ier d’Orange-Nassau à remporter certains succès militaires décisifs contre les Espagnols.
Il y a 100 ans, en 1913, disparaissait Honoré Champion, éditeur et libraire parisien. Né en 1846, il avait commencé à travailler à l’âge de treize ans dans une librairie, avant de se mettre à son compte en 1872, au n° 15 du quai Malaquais, dans le petit hôtel de Bouillon, dans un local occupé auparavant par un autre libraire, père d’Anatole France. Cédant la place à l’École des Beaux-arts qui s’agrandissait, il s’installa un peu plus loin, au n° 9 du quai Voltaire, puis 5 du quai Malaquais. En publiant dans les années 1930, aux éditions Calmann-Lévy, Paris au temps de la Renaissance. Paganisme et réforme, Fin du règne de François Ier, Henri II, etParis au temps des guerres de religion, Fin du règne de Henri ii, régence de Catherine de Médicis, Charles ix, il a contribué à faire connaître les épisodes liés à la Réforme à un large public. La maison d’édition Slatkine-Honoré Champion a quitté le quai Malaquais en 2013, mais continue à publier des ouvrages fondamentaux ayant trait à l’histoire du protestantisme.
Hélène GUICHARNAUD et Christiane GUTTINGER-METTETAL, Temples réformés et églises luthériennes de Paris, Paris, Ed. La Voix Protestante, 2013, à commander à La Voix protestante, 14 rue de Trévise, 75009 Paris, Tel.01 47 70 23 53, contact@lavoixprotestante.org 22 € (voir p. 7). Olivier LE DOUR et Grégoire LE CLECH, Les huguenots bretons en Amérique du Nord, … Lire la suite
CG : Laurent Berec, bonjour. Vous avez consacré une biographie à Claude de Sainliens. Ce Bourbonnais arrive en Angleterre avant 1565, au début des guerres de Religion. S’exile-t-il pour des motifs religieux ?
LB : C’est un calviniste convaincu ; il croit à la grâce divine, au salut par la foi. A certains égards, c’est même un puritain. Il s’attaque par exemple à la danse, au jeu, au théâtre. Il est clair qu’il s’exile parce qu’il est protestant.
Mais c’est aussi un réfugié économique, qui réussit bien financièrement : il ouvre à Londres une école très cotée, où il enseigne le français ; il écrit aussi de nombreux ouvrages qui connaissent beaucoup de succès, notamment ses manuels scolaires de français et d’italien.
Consécration suprême : dès 1573, la reine Elisabeth en personne lui rend visite dans son école de Lewisham, à dix kilomètres de Londres.
CG : Sainliens s’intègre-t-il à la société anglaise ?
Tombe d’Elie Neau dans le vieux cimetière de Trinity Church à New York
Quel destin « extraordinaire » que celui d’Elie Neau, naturalisé anglais et galérien protestant français, enterré à New York dans le vieux cimetière de Trinity Church, au sud de Manhattan !
Né en 1662 en Saintonge, il s’embarque comme marin à 12 ans, commerce dans les Caraïbes puis s’exile à Saint Domingue, colonie française devenue Haïti. Le protestantisme y est officiellement interdit comme en métropole mais de nombreux huguenots y vivent du commerce du tabac, de l’indigo, du coton et du sucre. Ils pratiquent un culte privé, se marient et font baptiser leurs enfants dans les iles à domination anglaise ou hollandaise.
Les mesures antiprotestantes se durcissant, Elie Neau s’établit à Boston où il épouse une veuve huguenote, puis à New York dont les huguenots constituent 10 % de la population à la fin du XVIIe siècle. Mais seuls les anglais peuvent commercer librement, aussi acquiert-il la nationalité britannique.
Combien de huguenots s’exilèrent-ils à Londres à l’époque de la Révocation de l’Edit de Nantes ? Ils auraient été entre 20 000 et 25 000 au début du XVIIIe siècle !
Un récent colloque a évoqué cet héritage : des personnalités marquantes comme celle du pasteur Daniel Chamier, de scientifiques comme Papin, médecins comme Chamberlen l’inventeur des forceps, ou l’acteur shakespearien David Garrick.
Une charte accordée par le roi Edouard VI en 1548 par le roi Edouard VI au réformateur polonais Johann a Lasco pour l’établissement d’églises étrangères, facilita la fondation d’églises réformées françaises. Les plus importantes furent celle de Savoy dans le quartier de Westminster, et de Threadneedle Street dans la City.
Le faubourg de Spitalfields attira les artisans de la soie et de la mode. Tisserands, tailleurs, chapeliers, modistes, perruquiers, merciers, tapissiers, fabricants de mouchoirs et d’éventails développèrent leur industrie de pair avec toute une économie du quotidien et des métiers de bouche (vins, fromages, pain). Des rues anciennes -comme Fleur de Lys Street ou Elder Street, la rue des Anciens- évoquent encore ces huguenots.
Les plus prospères créèrent pour la main d’œuvre ouvrière, souvent misérable, des caisses de solidarité et des écoles.
Ancien temple de l’Artillerie(Sandys Row)
Ils firent édifier une trentaine de temples. Certains subsistent, mais leur changement de destination témoigne de l’assimilation des Huguenots et des vagues successives d’immigration qu’a connu Londres : la dernière ← synagogue de Spitalfields occupe l’ancien temple de l’Artillerie (Sandys Row) ; un temple de Brick Lane précédé d’un minaret d’aluminium est devenu mosquée, après avoir été synagogue, un autre utilisé un temps par des baptistes, puis des méthodistes (Hanbury Street), abrite de nos jours un marché de vêtements d’occasion…
Pour les huguenots, se posa au XVIIIes la question de rester dans la non-conformité des églises protestantes non anglicanes (églises réformées françaises, mais aussi Quakers et baptistes) … ou d’opter pour la conformité, c’est à dire intégrer l’église anglicane… ce qui donnait accès aux droits civiques et commerciaux, ainsi qu’à l’aide pécuniaire royale (royal bounty).