par André Encrevé
« Je meurs dans le sein de l’Église chrétienne réformée de France où je suis né et où je me félicite d’être né » écrit François Guizot au début de son testament. A l’occasion du 150e anniversaire de sa mort, il m’a semblé opportun de nous intéresser au rôle que ce grand universitaire, homme politique très actif jusqu’en 1848, a joué dans la vie du protestantisme français.
Dans le domaine institutionnel, il est le président de la Société biblique 1855 à 1868 et le président de la Société pour l’encouragement de l’instruction primaire parmi les protestants de France de 1852 à 1872.
Il est aussi membre du consistoire de l’Église réformée de Paris 1815 à 1874, soit pendant 59 ans, ce qui doit être une sorte de record. Dans les années 1860 cette Église est le théâtre d’une très vive querelle entre la tendance évangélique et la tendance libérale. Et Guizot, le plus illustre des évangéliques, y joue un rôle très important, modérant souvent les ardeurs de certains de ses amis. Il est aussi l’un des principaux orateurs de la tendance évangélique lors du synode de 1872, seul synode officiel du XIXe siècle, et son intervention en faveur de l’adoption d’une Déclaration de foi y est très remarquée.
D’autre part, dans ses livres d’histoire, il lui arrive souvent de présenter le protestantisme sous un jour favorable. Par exemple, à propos de l’Angleterre, il explique que c’est parce qu’ils sont protestants que les Anglais sont libres, puisque le protestantisme, qui prône la liberté dans le domaine religieux, est parfaitement compatible avec un système politique fondé sur la liberté.
La plupart des protestants regardent l’Église catholique comme un adversaire à combattre. Ce n’est pas le cas de Guizot, qui dès 1838 explique que la France ne deviendra pas protestante et que, de ce fait, comme les protestants et les catholiques ont un ennemi commun, l’agnosticisme militant, le mieux est qu’ils s’unissent pour défendre le christianisme contre leur principal adversaire. Il tient beaucoup à cette idée qui le conduit, par exemple, à défendre le pouvoir temporel du Pape en 1861, au moment où celui-ci est mis en question. Il est vrai que cette prise de position, très personnelle, est mal comprise dans le monde protestant. Il reste que Guizot illustre aussi sa volonté de défendre le christianisme, et donc le protestantisme, en publiant entre 1864 et 1868, trois volumes de Méditations sur la religion chrétienne où il s’efforce de présenter toute une série d’arguments doctrinaux à opposer aux libres penseurs militants.
On le voit, tout au long de sa vie Guizot montre un très grand attachement au protestantisme.
(Chronique des Amitiés huguenotes internationales diffusée à la fin de l’émission SOLAE, sur France-Culture, le 8 septembre 2024, à 8h55)
Au cours de l’année 2024, plusieurs manifestations organisées en coordination avec l’Association François Guizot présidée par Stéphane Coste, ont marqué le 150e anniversaire de la disparition de François Guizot : des conférences au Val Richer (Normandie) où il séjourna, à la Société de l’histoire du protestantisme français, et une commémoration nationale sous la coupole de l’Institut de France.